Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
14 septembre 2011 3 14 /09 /septembre /2011 16:05

L’accent est habituellement mis sur la dimension thérapeutique de l’approche contextuelle. Laquelle est irriguée par le concept de don, dans une cohérence effective entre les valeurs qu’elle porte et leur expression opérationnelle. Fractale traduit cette démarche à laquelle j’adhère pleinement. Mais je ne suis pas thérapeute, il me fallait donc « traduire la contextuelle » dans mon champ d’intervention, l’accompagnement socio-éducatif.

 

Alors que j’étais invité par des étudiants à définir en une phrase le métier d’éducateur, je répondais qu’il consiste à mobiliser les ressources des personnes fragilisées par la vie. Je me surpris à « lâcher » sans recul cette formule. Ce fut le point de départ d’une réflexion qui eut deux points d’appuis, le concept de don appliqué aux relations et mon expérience éducative influencée par la contextuelle.

 

Une notion, la relationnalité, s’imposa progressivement. Je la définis comme une clinique des relations portée par un dialogue régulé par les composantes du don. La relationnalité met en perspective des questions qui traversent quotidiennement nos pratiques : comment donner et recevoir, chercher la confiance malgré la défiance, articuler l’attention à soi et le souci de l’autre, construire des relations fiables malgré nos limites… ? Comment approcher la justesse relationnelle en acceptant les nécessaires confrontations, conflits, défis, insoumissions, mais aussi l’alliance, la générosité, la sollicitude… ?

 

Son originalité est multiple. Tout d’abord, elle traduit les composantes du don dans leur perspective relationnelle grâce au dialogue. Outil privilégié de l’éducateur, le dialogue est par essence un mouvement entre soi et l’autre. Comme tout geste lorsqu’il relève du don, il peut apparaître sous deux formes - lier sans défier, défier pour lier –, se caractérise par trois verbes – donner, recevoir, donner à son tour - associé à quatre composantes - l’attention à soi et le souci de l’autre, la liberté et se sentir l’obligé de l’autre -. Sa mise en mouvement s’appuie sur cinq postures – oser la confiance, se laisser aller à la sollicitude, appliquer la réciprocité d’engagement, chercher la relance constructive, reconnaître son héritage relationnel.

 

Ensuite la relationnalité sollicite la clinique pour nourrir le dialogue. A travers les paroles échangées, les composantes du don se mêlent aux dynamiques intrapsychiques, aux histoires relationnelles, aux phénomènes communicationnels, aux sentiments, aux modes de pensée et d’élaboration, aux aspects culturels et aux valeurs de chacun. Dès lors la clinique devient nécessaire pour saisir ce qui pourrait faire fructifier la dynamique de don mais aussi ce qui la pervertit. Elle peut être entendue comme une attention à ce qui se lie et se noue entre plusieurs personnes dans un contexte d’échange, Elle est également regard sur soi engagé dans une relation source d’échange.

Enfin, la relationnalité ouvre à une posture éthique, elle permet au professionnel d’ajuster son intervention en engageant sa subjectivité dans un geste qui intègre la considération de l’autre.

 

La période de mutations sociétales dans laquelle nous sommes engagés nous conduit à bâtir de nouveaux modèles sur lesquels appuyer notre action. La relationnalité participe de ce mouvement. Elle fournit un modèle d’analyse et des outils d’intervention qui favorisent la mobilisation des ressources relationnelles des personnes et des groupes, et leur permettent d’agir sur leur vie.

 

En définitive, la relationnalité offre aux professionnels concernés par les métiers du lien :

- L’opportunité de ne rien lâcher de l’humanisme qui fonde ses pratiques.

- Une démarche d’intervention rigoureuse et simple à saisir, qui vise à mobiliser les ressources relationnelles des personnes en tenant compte de la singularité de chaque rencontre. Démarche qui permet de penser la bientraitance et qui offre un modèle de management alternatif (Cf. Don et management : de la libre obligation de dialoguer, L’Harmattan, 2008).

- Un positionnement théorique qui ouvre à la complexité, parce qu’il s’enracine dans le don en sachant s’enrichir des autres disciplines, et parce qu’il décline depuis sa finalité jusqu’à l’action concrète, sa cohérence et son efficience.

- Par un « vocabulaire » compréhensible et communicable à tous, la possibilité d’être plus aisément « reçue ».

 

 

Philippe Poirier Responsable des formations initiales  à l’EFPP, Paris.

www.donpoirier.fr 

Nouvelle contribution à paraître à l’automne 2011 aux éditions Chronique Sociale : Mobiliser les ressources fragiles : don et bientraitance.

 

Partager cet article
Repost0
Philippe POIRIER - dans Actualités

Où êtes-vous ?

... sur le journal en ligne de l'Association FRACTALE.

Nous souhaitons ici vous informer de la vie de l'Association, vous présenter nos réactions à l'actualité et offrir un espace d'échange et d'interactivité. Vous y découvrirez l'attachement aux valeurs qui motivent nos actions.

Pour accéder au site cliquez ici

logoblog-copie-1

Recherche

Participer et contribuer

- soit en postant un commentaire court pour réagir

- soit en soumettant un article de fond ou d'actualité au comité rédactionnel à contact@fractale-formation.fr

- rejoignez-nous sur 

 facebook-logo-copie-1

Archives